Les récits des voyageurs,
qu’ils aient pour but de divertir, d’informer, de dénoncer, etc. sont toujours
des récits perdus, que l’on oublie, dont on ne retient finalement que des
fragments et qui ne se stockent nulle part. Repris et répétés, ils circulent
pendant un temps puis disparaissent. Personne, s’il lui arrive d’y repenser, ne
s’intéresse au fait qu’il a pu lui-même, un jour, en être la source. Gilles Tiberghien dans « Le
principe de l’axolotl »
Je rêve
d’être un axolotl, c’est gentil et puis c’est follement étrange. Même le nom ne
vous dit rien, il a une consonance un peu barbare, puis il ressemble un peu à
une onomatopée un peu assourdie ou à un médicament oublié. L’axolotl est en fait
une sorte de salamandre géante, c’est la race albinos la plus étrange, elle
ressemble à un fœtus extraterrestre, et ça atteint une taille adulte en moins
d’un mois. « Je suis axolotl dans
son milieu naturel »
Hier soir
le monde était triste, il y avait comme une grisaille qui passait sur les yeux
de chacun, ce qui les rendaient mélancoliques, mais vous savez pas cette
mélancolie qui fait naître des belles histoires ou des poèmes tout en gravité,
non, c’était une tristesse silencieuse où aucun mot ne peut vraiment faire
décoller les sens. Nous restons, cloués à la même place, avec une fange qui
nous emplit le cœur… Doux programme. :p
Caro
était si silencieuse ce soir qu’elle avait vraiment l’air d’une étoile, d’une
lune, d’un astre un tout pti peu mort qui laissait entrevoir par quelques mots
une présence finalement bienveillante, aimante. Moi j’adore mon alien J
Aujourd’hui
le jour se lève encore une fois sur un ciel blanc, moite, sans soleil, sans
sommeil, je ferme les rideaux pour revenir à l’état de nuit, m’adonner à
quelques heures de sommeil. Nous sommes le 1er juin de l’an 2000,
7h25 am, le monde va bien, il nous écoute, nous observe et nous aime.
14h32 – Le problème avec le monde s’est
que l’on doit infiniment se révéler à lui-même et à ceux que l’on aime, prouver
que l’on existe. Ensuite se donner cette utilité qui nous anime et sans
laquelle on se sent moins que rien, bon à jeter, ordure ménagère du quotidien
et du monotone. La vie est parfois la même chanson remise en boucle dont on se
lasse quelque fois, mais à la longue la mélodie nous transcende, nous porte et
nous fait sourire.
Chose
inanimées avez vous une âme ? Et quand je ne bouge pas, est ce que je
perds la mienne ?
Moi
j’aime croire que les choses sont en sommeil, que sous quelques centimètres de
calme une tempête rugit, prête à tout balayer et redonner un courant propre à
la vie.
Je suis la fille des
courants marins, celle qui s’emporte au gré du vent, ça et la, de l’orient à
l’occident…Celle qui vit loin, au-delà des étoiles et qui pourtant chaque soir
est la pour moi, heureuse, triste ou avec le regard qui fait peur et le sourire
rebel…
Jour de
la fraîcheur refroidie, les temps sont durs. Je m’enlise une fois de plus pour
de longues heures à remplir, prisonnier d’une solitude bien née, une solitude
que je nourris à la cuillère. Pourtant ma pensée vagabonde, va loin, elle
traîne dans les rues du monde, se fait exil dans ma carapace et change la
rotation de certaines planètes en sursis. J’ai les yeux ici et ailleurs, un
cœur rempli de trois fois rien avec des mots qui mènent loin et font briller
les yeux.
Quel est
le mot qui me sauvera ? S’il te plait dis-moi ton nom, vite…
18h02 - Une pie sur mon
balcon, on me dit brillant, vole moi, emméne moi loin, dans ton repaire de
plumes et de branches. J’attendrai patiemment que les temps jeunes
ressurgissent, ces temps où certains mots avaient encore la place et l’utilité
d’être dit. Un temps qui ne change pas assez vite pour vous perturber, qui vous
suit presque au pas, et qui finalement vous ressemble car vous êtes en
harmonie, conscient de votre état, de votre valeur indiscernable mais présente.
Je suis le commencement du monde…
La
noirceur de m’atteint pas, la noirceur
ne m’atteint pas… plus.
La pluie
raméne ses derniéres gouttes, des larmes vieilles d’un jour, qui succombent à
l’attraction et tombent sur mon visage. Je reste immobile, je pense, je vis, je
resiste aux éléments, qui fyuant à toute allure emporte mes pensées trop
légéres, les envolent loin, où elles forment dans cet horizon fermé un voile à
peine discernable, une toile qui dit j’étais la, j’ai bien capté tout ça, je
vis en même temps que vous, je suis vivant et j’existe.
Quand
d’autres cultivent la joie et le bien vivre, d’autres cultivent la profondeur.
On ne peut pas tout avoir, ni tout être à la fois…Et pourquoi pas ???
Je suis tout ce que je suis
et bien plus encore, je suis sentiment lucide d’eternité et
d’universalité !
Je suis le siécle fécond de
toutes espérances, le commencement qui dure et qui fait agir, vite, bien,
précisément…
Vendredi
2 juin 2000
Vous avez
me dire qu’il est facile d’être heureux, il n’y a pas de recette magique mais
le bonheur ça va ça vient, une sorte de vase communiquant appliqué à la vie,
agrémentée de maximes populaires qui ont fait leurs preuves plus d’une fois
(Apres la pluie le beau temps, le chemin vers la réussite est semé d’embûches…)
Moi je
cherche le détonateur, celle qui allumera la mèche et mettra le feu aux
poudres, moi je veux des éclairs, des coups de foudres, un truc à faire chuter
de 30% les actions d’Electrabel… Je l’aurai enfin à moi mon petit bonheur que
je pourrai caresser du bout des doigts.
Mon
contact avec le monde se situe dans les magasins, plus particulièrement un
grand magasin, à quelques pas de chez moi, seule ruche bourdonnante à des
kilomètres.
La j’y
trouve ce qu’il me faut, les substances qui me désaltéreront et me nourriront,
parfois une revue où l’autre pour prendre la température de l’époque ou
quelques cd qui me feront du bien aux oreilles et au cœur.
En ce
moment, mon contact avec la gent féminine se limite à l’approche relative des
caissières de grandes surfaces. Pas que c’est un phantasme que je gère mal,
mais c’est la manière la plus facile de rentrer en contact avec « l’espèce
humaine ». Pourtant le dialogue est limité, répétitif et ne s’inspire de
nul courant littéraire, poétique ou philosophique. Quoique…
Les mots
toujours identiques, comme un mantra répété à longueur de fois, comme si la
journée se répétait inlassablement ne changeant que l’apparence des corps et
des voix.
Ce
vendredi, elle était blonde, ses yeux paraissaient fatigués mais sa voix
gardait pourtant cette jeunesse pétillante et forte qu’on certaines filles
séduisantes.
« Bonjour »
en me jetant un coup d’œil de courtoisie, je réponds dans un sourire
« Bonjour… »… Apres avoir liquidé mes maigres achats « ça fera
750 Fb »…
Je lui tends ma carte bancaire « voici »… Le ticket sort, elle me
le temps en disant « merci »…
Un merci sans suite, qui m’expulse déjà dehors, me laissant retourner à
mon vide perso à moi que je couve sans rancune… Un merci que je voudrais tant
suivi d’une foule de chose, car les mots seuls sont toujours mal accompagné, un
merci beaucoup ferait certes trop (vu le maigre montant de mon achat), un merci
bien, sans doute trop plat, un merci à vous, déjà trop personnel et un merci
toi, faut même pas y penser, à la limite ça ferait vulgaire…
Et puis
il me vient l’envie d’entendre tout ce qui sous tend les merci, tout ce qui ne
se dit pas et se pense, ou pire ce qui ne se pense pas mais qui sort d’on ne
sait où, qui se libère et court à toute allure dans les méandres de ma mémoire,
valorisant le présent et enchaînant la mélancolie d’un passé déjà révolu…
« Merci
d’être venu, merci d’être la, de me faire ce sourire, ces yeux la, merci d’être
ce que tu es, merci pour ce que tu m’apportes, merci de continuer à vivre,
merci d’exister… » Tout cela avec la sincérité propre à l’acte, sans doute
machinal, presque professionnel, avec ce qu’il faut d’émotion mais pas trop, on
y croirait plus, et il faut il croire, se faire des rêves qui durent, des rêves
mécaniques bien construit, côtés en Bourse et protégé de toute inflation.
Le soleil
donne, il me barbouille de sa lumière, me rend encore plus au fait de la vie,
son ciel est doux, un bleu pastel qui contraste avec le bleu obscur des ombres
qu’un arbre lourd projette sur la rue. Quand on passe à côté de toutes ces
maisons et que l’on se sent si seul, elles commencent à vous parler, vous
mettre dans le secret, vous révéler qu’elles sont plus qu’un tas de briques
bien agencé, qu’elles ont une âme au même titre que nous, qu’elles respirent et
nous parlent parfois. Il suffit de savoir écouter, de pouvoir apprendre des
choses qui nous entourent, de savoir garder un secret et d’être profondément
livré à soi-même.
Celle
d’en face me dit que ses habitants ne sont jamais la, que d’un côté elle aussi
se sent seule, qu’elle profite d’une fenêtre ouverte pour faire circuler l’air,
pour emplir ses poumons, et dans une dernière expiration elle rêve de portes
ouvertes, elle rêve qu’elle est différente, une maison d’artiste, une maison
remplie d’enfant, un château, une cathédrale… Elle aussi elle pense que c’est
bien de rêve être autre chose, parce qu’être soi ça suffit pas toujours. Je suis la maison d’en face qui rêve…
La
première fois que nous sommes arrivés dans la maison qui est celle de mes
parents, j’avais 4 ans. Au fond du jardin une cabane qui a fait la joie de mon
enfance, un arbre y était accolé. Quand je regarde toutes ses années qui sont
passée et repassée dessus, je ne la vois plus, une ruine pourrissant au gré de
la mousse et des mauvaises herbes, couchée comme un animal mort, elle renferme
encore dans ses poches d’airs, minuscules bulles d’oxygène rare, les souvenirs
enfouis de mon enfance. Et dans une éruption verte elle survit d’une manière
différente, gardant au plus profond d’elle l’écho magique de mes cris
émerveillés, de ma rage qui prenait forme et mes pleurs qui la faisait
s’affaisser encore un peu plus. Je suis
cabane de mon enfance, au cimetière des éléphants…
samedi
3 juin 2000
Les gens sont pleins de
ressentiments pour eux-mêmes, mais ils ne font pas toujours ce qu’ils disent
qu’ils vont faire. Heureusement.
Entre temps, ils auront eu le
mérite de nous faire peur…
Me poser
des questions, celles qui durent et ne lâchent pas, me résoudre à tisser les
mots qui feront de ma vie une réponse à ceux qui se demandent de quoi elle est
faite.
Je réalise
que mon journal prend des tournures plus surréalistes, poétique et surtout
imagé de divers sens dont je laisse l’interprétation à votre libre imagination.
Isabelle
est une personne charmante, elle a des mots qui redonne parfois une énergique
que l’on pensait disloqués, quelque part dans le passé.
Elle
me dit « enfin... j'espère ne pas être seulement de passage
dans ton journal, dans ta vie »
moi : «les gens sont toujours de passage »
Elle : « oui mais s’ils passent souvent ça va ».
Je ne
sais pas à quoi ça mène des phrases comme ça, mais pour conclure et répondre à
sa question « et toi tu n'as pas un
ti pincement pour qq1? »…
Désespérément non, j’ai une théorie la dessus, une théorie folle, idiote et
hermétique. Elle se nomme la restauration de la chimie amoureuse…
Je pense
que chaque personne a en elle ce qu’il faut de « chimie » pour tomber
amoureux d’une personne, et plus on aime plus cette chimie s’évacue, se
dissolvant dans les méandres de l’imaginaire, laissant par après peu de temps
pour encore s’émerveiller, faisant du quotidien une valse de regret et de
revanches jamais accordées. L’homme combat donc cet état de fait, et cherche à
tout prix à restaurer sa chimie perdue. Et souvent se perd dans des illusions,
se laissant aller à écouter son désir avant d’écouter son cœur. C’est très
théâtral tout ça, le choix entre la raison et la passion, l’un des deux mène
aux regrets, l’autre aux tourments… Parfois chacun mène au bonheur, mais ça, ça
dépend de chaque individu…
17h30-
Suite par après, je dois partir dieu c où… Je suis départ dans l’espace incertain du moment.
23h30 –
Rentré d’on ne sait où … Sans but, sans identité, jamais dérouté, à la
recherche de rien ou peut être du mystère insondable qui gît comme un animal
mort ou pas tout à fait mort au fond de chacun. Je cultive des pensées hyper
caloriques qui me font grossir l’âme à toute vitesse, je penche du mauvais
côté, je deviens vénéneux et chlorhydrique… Même si l’ennui n’était pas
constant, il a pointé le bout de son nez et m’a piqué au vif.
En
rentrant, longeant le champ, je fus attiré par une masse noire qui modifiait
mon quotidien et éveillait ma curiosité… Un animal mort ? Une tête ?
Un œuf de Pâque géant ? … Une citrouille ! Je ne sais pas de quel
vaisseau spatial elle est tombé, mais me voilà en face d’une citrouille tout ce
qui a de plus citrouille. J’ai du
rester quelques instants devant ce « phénomène » analysant mollement
toute la portée de ce sens ou de ce fait extraordinaire. Car dans une vie
monotone, le moindre fait sortant du quotidien prend des allures irréelles,
surnaturelles. A demi coincé dans l’ombre et la lumière pale d’un réverbère,
elle semblait gonfler et battre comme un cœur, une citrouille qui respire… Mais
l’optique réserve de ses illusions dont on ne revient pas J En partant je me suis entendu crier
mentalement doucement puis de plus en plus fort… « s’il te plait
transforme toi en carrosse ! ». Mais elle restait citrouille et je
restais seul.
dimanche
4 juin 2000
Je suis mémoire vive
branchée sur un serveur imaginaire…11h18 déconnections
Vapeur
d’eau sur la vitre, le temps s’allonge dans un brouillard qui rend les choses à
demi floue, d’une blancheur fantomatique, l’aube applique le voile qui nous
fait un tout pti peu aimer le monde, un monde moins tranchant, tout en douceur,
pastel, un monde mou, guimauve, marmelade J
Sabrina
est une petite personne qui cache ses atouts, c’est une fille pochette surprise
avec qui on sait jamais sur quoi on va tomer, le pire comme le meilleur. Mais
en ce moment elle est adorable et le sait bien :p
Moi je
connais une fille c’est pas une fille, c’est un poisson volant. Enfin pas
tout le temps, parce que parfois elle est assez femme pour faire craquer un
million d’homme, non moi je vous parle de sa véritable identité, un ptite
sirène vous dis-je, avec des ailes que même ont dirait un ange quand elle
sourit.
J’ai lu
quelque part que quand un poisson volant est poursuivi, il sort de l’eau et
déploie des ailes, alors il vole, vole, vole et quand il est à bout de force,
il replonge, il est déjà ailleurs et son prédateur peut le chercher et
s’acharner, il est déjà plus la… Il a changé d’eau comme on rêve parfois de
changer d’air, de changer de vie.
Mais
comme elle a pas de nageoire, pas de d’écailles ni d’arrêtes, alors elle est
fille, fille des courants marins en bikini bleu-gris, ont dirait une Venus
sortie des eaux, miniature et mignonne J Moi j’vous dit, les poissons ont la côte cet
été, même si ils cachent bien leurs jeux …
Océan chaud, peu servi,
cherche banc de poissons pour se faire animer.
Vous
savez, un e-mail c’est parfois aussi chaud qu’une lettre, ça donne la péche
parce qu’on sait que l’on pense à vous un peu partout, puis pas de poste, pas
de relais, ça va vite. Moi j’aime bien, pourtant j’en envoie jamais des tonnes bizarrement.
Je suis même assez avare, peut être une pudeur que je maitrise mal.
Isabel_
est une petite personne plait d’attrait comme toutes les personnes d’attrait,
elles savent pas qu’elles en ont et quand on lui dit, elle fait comme si elle entendait
pas, les gens sont sourds parfois. Isabel s’essaie à l’amour, laissant son cœur
battre pour des gens qui d’un premier abord ne sont pas pour elle (« oui je ne comprends pas
pourquoi on s'attache sans cesse à
des gens qui ne nous respectent pas tout le temps! ») et qui en réfléchissant à deux fois et
plus réalise que le petit pincement au cœur c’est pour lui qu’elle l’a. On sais
jamais si c’est de l’amour, parce que tout compte fait on sais pas ce que c’est
réellement l’amour. C’est cette sorte de sentiment qui vous fait aimer
n’importe qui ou n’importe quoi dans un minimum de temps, le rendant alors
éperdument indispensable à notre joie de vivre, notre bonheur et notre sourire
quotidien.
Franchement je l’aime bien mon
Isabel virtuelle, ça rime en plus J et au
fond d’un cœur pourtant lourd de ne plus battre je lui souhaite bien entendu
d’aimer et de se faire aimer jusqu’à ce que bonheur s’ensuive. Moi je ne pense
à personne, ça libére l’esprit et évite bien des soucis. Pourtant un jour ou
l’autre je devrai bien faire un choix, mais bon, c’est pas encore demain, on
verra ça le 21 octobre.
lundi
5 juin 2000
Je suis
sur une tour, je rêve, planté la, au milieu de nulle part, je regarde et je
vois loin. Les arbres qui jettent leurs branches contre le vent, les prairies
en sommeil sous l’insouciante rosée, les chemins qui serpentent, certaines
maisonnettes remplies du rêve de leurs habitants, et des murmures qui
parcourent le temps et les environs.
Au-dessus
il y a des nuages de pluie à vous glacer le sang. On sait bien comment ça finit
tout ça, un nuage ça n’a qu’un langage, qu’une vie, celui d’obscurcir le soleil
et pleuvoir un peu, ma foi c’est une belle vie d’être nuage quand on y pense.
Moi je
serais un nuage qui parcourre les océans et qui pleure jamais, je serai un
nuage héros, un qui marquerait la vie des autres nuages, qui ferait un peu
partie du panthéon, de la mythologie aérienne. Je me vois déjà, orné
d’attributs enviables, casque d’airain, glaive étincelant, visage harmonieux,
un vrai rêve ce nuage !
Alors que
je m’y attendrais pas je rencontrerais un autre nuage avec un accent bizarre,
il me parlerait du pays où il vient, il me dirait qu’il fait froid la bas mais
que pourtant la chaleur qu’il a en lui permet de compenser, il me dit aussi qu’il
a des secrets étranges et inavouables, puis une peine régulière, quasi
familière qui le poursuit comme une ombre. C’est un nuage assez particulier
parce qu’il ressemble à un aucun autre nuage, il est d’un autre espace temps,
car quand le matin se lève chez moi un soir se couche chez lui. Alors il aime
me parler à ce moment car vous comprenez dans le pays d’où il vient les nuits
sont si noires et mon nuage à peur de la nuit, surtout quand la lune s’absente
et que les étoiles font grève (bien entendu qu’elles font grève, de la à savoir
si elles sont syndiquées, vous m’en demandez trop). Et ce qui est étrange
par-dessus tout c’est qu’il est en croissant, parfait pour commencer le matin,
un croissant parfait, comme une petite lune justement, mais blanche et cotonneuse.
Je lui
répétais qu’il fallait pas avoir peur de la nuit, parce que la lune quand elle
brille c’est un peu comme un autre soleil et qu’avec ses rayons ça réchauffe
l’intérieur quand le soleil réchauffe l’extérieur, il en faut un peu pour tout.
Avoir peur de la nuit c’est comme la peur des araignées, ça se contrôle pas
vraiment…
Les nuits
ne se comptent pas, elles se vivent.
La
lumière a fini par tout délayer, la brume d’alors est partie brumiser ailleurs,
se coller contre quelques vitres ou réveiller chaque goutte de rosée encore un
peu engourdie.
Le gris
du ciel s’est transmué en un blanc-bleu, infiniment pâle qui fait du bien aux
yeux qui les regarde.
Vous me
demanderez ce qu’est devenu mon nuage en forme de croissant ?
Il a
franchi l’océan et moi je suis resté la, au loin une auréole un peu brillante
qui me rappelle son passage et qui me fait dire que mon nuage est une nuage,
avec un cœur de brume qui bat à l’intérieur, à chaque battement elle se
rapproche un peu plus des gens qui l’aiment et à chaque larme elle disparaît un
peu plus.
La
tristesse ne sert à rien, peut être se vider de quelque chose qui n’existe pas,
de quelque chose qui s’éteint et qu’on voudrait rallumer avec de l’eau.
On a de
ces sentiments indiffusables qui nous percent le cœur et qui voudraient sortir,
comme une foudre pour tout balayer sur son passage, alors on serait libéré et
pur, immaculé…
J’ai le
désir mille fois réveillé, il pense tout haut, il frappe, tape à la machine,
écrit ici une lettre à un destinataire inconnu, l’envoyeur est timbré, il livre
sa vie comme un colis, je suis connecté et je vois loin. J’ai repensé à l’idée
de la bouteille, elle me grandit cette idée…
J’imagine
un adolescent recopier quelques dizaines de pages racontant sa vie et les
mettre dans une de ces bouteilles bleues si belles qu’une célèbre marque d’eau
minérale à sorties pour le millénaire, et cette bouteille jetée à la mer serait
livrée à la vie des flots, ballottée au gré du vent, des tourbillons, des
remous et cet homme qui aurait pris soin de grandir entre temps aurait vu lui
aussi sa vie comme celle d’une bouteille jetée à la mer, ballotté de part en
part avec un terrible mal de mer qui vous gonfle le cœur et le fait éclater
cent fois en pensée. Un jour qu’il se promène sur la plage il retrouve sa
bouteille comme l’ombre d’un passé soudain projeté contre sa vie qui n’en
demandait pas tant… Il prend soin de contourner la bouteille, de la regarder
d’un œil surpris, étonné, remuant sa mémoire et ses sens, ne pouvant croire que
c’est sa bouteille… Pourtant la où il avait gravé ses initiales une ligne
sécantait les lettres comme un retour à l’envoyeur qu’une poste céleste aurait
tracé finement. Au moment de la prendre entre ses mains, son souffle
s’accélère, un cœur qu’il pensait en berne se remettait à donner le tempo, un
pouls vaillant battait sur ses tempes. On ne sait jamais ce que peut sortir
d’une bouteille, l’ivresse, un génie, des illusions perdues… Mais au moment de
sortir les feuillets il réalise que la couleur a changé, une décoloration
n’aurait pas pu faire cela, l’eau n’y avait même pas pénétrée ou si peu.
Ouvrant fébrilement, il sort les feuillets d’un bleu azur, sur la première page
commence une date qu’il n’a jamais vécue, du moins dans ce journal, comme si ce
journal avait continué à vivre, à vivre sans lui, en dehors de lui. Une
écriture étrangère, belle, fine, laissait des lignes harmonieuses, une écriture
féminine qui savait laisser des marques ailleurs que sur une page, la première
page commençait par…
« Qui
sommes-nous ?… »
Je suis
l’arche de Noé des rêves oubliés, je garde pour l’humanité les rêves perdus de
chaque être, de chaque chose, je suis le souvenir vivant d’un monde oublié et
en cas de déluge, je suis insubmersible. Ici sur mon Ile déserte, je vois
passer les bouteilles au loin sur l’eau, je vois les rêves se faufiler au creux
des vagues et les nuages se balader comme des âmes ralenties. Je me dis que
tout cela est bien, que la vie s’ébroue parfois pour donner un peu de chance à
ceux qui savent l’écouter et vivre.
Pourtant
au fond de moi un terrible sentiment de trop peu, trouver le bon nuage qui
m’entraînera dans son ciel, qui me montrera un bleu pur sans colorant ni
conservateur, un bleu naturel qui tient chaud la où il faut et qui colore les
yeux un peu, beaucoup, passionnément J
Je suis un texte qui n’en
finit plus d’exister, parce que ça fait du bien de vivre… parfois.
Mardi
6 juin 2000
Je suis une fraction
résiduaire…
J’ai
appris que dans la collecte des déchets, une fraction résiduaire était un
déchet non catégorisable, genre papier sulfurisé ou plastiques composés… apres
tout je suis un amalgame de chair, d’os, de fluides, cheveux, ongles, dents,…
C’est un peu curieux quand on y pense, l’homme est un objet si il fait tout
pour le devenir, un objet qui bouge, mais pas tant que ça, qui pense, mais pas
tant que ça et qui vit, alalala, faut le dire vite pour le croire J
Objets inanimés avez vous
une âme ?
Dans mon
appart tout est calme, en dehors aussi, mais à l’intérieur c’est fou ce que
c’est calme… On dirait que le temps à cessé de fonctionner, qu’il a gelé et que
ses rouages ont fait une petite pause, histoire de voir comment ça marche quand
lui fonctionne pas.
Le vent
souffle et frappe telle une caresse franche sur la fenetre, le frigo ronronne…
Il pourrait aisément remplacer le chat que je n’ai plus, puis un frigo c’est
pas mal comme compagnon. Contre les idées courantes, un frigo ne tient pas
qu’au froid, il suffit de le contourner pour réaliser que dérriére il souffle
chaud. C’est comme ça avec pas mal de personnes dites froides. Suffit de
trouver le bon angle.
J’ai fini
par sortir aujourd’hui, quelques heures ceci dit, j’étais déjà assez fatigué
comme ça, puis cette promenade me semblait déjà vaine avant de commencer. Mais
je devais aller chercher des protéines en poudre pour maintenir mon corps en
état, pas de fonte musculaire du au manque d’aliments… Pour ne rien cacher je
ne suis pas tres en forme, mon journal souffre en même temps que moi. Mes mots
sont lents, ils ressemblent à des choses qu’on aurait laissées un peu trop
longtemps mûrir, ils ont finalement passé leur date de péremption.
En
revenant, j’ai croisé Fabrice dans le métro, sans doute un de mes meilleurs
amis, même si habitant à 10 minutes de chez moi je ne le vois que à l’occasion
du hasard. Il me raconte que sa vie est minable, qu’il décline peu à peu et
qu’un jour ou l’autre, bhen…
On dirait
que j’en suis la aussi, soulevant à bout de bras une existance fatiguée d’être
ce qu’elle est.
Ma
solitude est malade, je vois des gens, ainsi au détiment de ma solitude, je
nourris mon ennui et confirme mon inaptitude à vivre.
Je suis l’horreur des temps
moderne, je suis rédemption dans la grande vacuité du temps, je suis le
reproche sans cesse remis au goût du jour.
Je voudrais être magicien, pour
me faire disparaître….
Addition : Je suis une fraction résiduaire…1999, USA… Un SDF endormi dans une
poubelle se fait décapiter dans un broyeur de la benne à ordure. Chaque année,
des dizaines de sans-abris pris pour des tas de chiffons meurent dans ces
conditions.
mercredi
7 juin 2000
Vais-je pouvoir continuer
ainsi ?
Dans cet infini dans lequel
on ne ressort plus
…
Les gens
normaux pensent le plus souvent qu’il est facile de trouver une solution à un
probléme simple, ils ont sans doute raison dans la majorité des cas. Mais la
douloureuse sensation d’être au-dela de la majorité des cas tenaille et fais
mal. On se sent parfois valorisé par cette différence certes, mais le plus
souvent exclus d’un monde que l’on ne comprend plus trop et qui lui vous
rejette comme un élément peu fiable.
J’ai du
me lever plus tôt, ma mére venait prendre de mes nouvelles. Je fus peu bavard,
car en somme il n’y avait rien à raconter. J’avais l’impression qu’elle venait
visiter un malade et que mon appart, tantôt chambre d’hopital, tantôt prison,
rarement refuge se refermait sur moi.
Note : Je donne parfois certaines
références musicales pour partager des choses, me dire que peut-être quelqu’un
saura se mettre dans une situation d’emerveillement pareille à celle que je vis
quand j’écoute certains morceaux. En ce moment Closer des
Corrs. Puis ensuite enchaimenement sur l’ablum October de U2.
384 000 km… Elle est loin
la lune.
Lumiére
discrete sur un monde chaotique… Et pourtant la lune n’est pas paisible disait
elle, la lune détraque tout.
J’aimerais
être de la lumiére lunaire, je pourrais me coller à certaines vitres et
attendre patiemment qu’on m’ouvre. Alors je rentrerais doucement comme une
vapeur d’ether sans odeur et la je caresserais son visage, tranquillement,
jusqu’à ce que la nuit s’achéve et que je retourne à ma nuit, à l’autre bout du
monde. Je sauterais de nuit en nuit, faisant le tour du globe, longeant l’ombre
du temps et me glissant ça et la dans les recoins et cavités. Je me nourrirais
de vos silences, vos silences qui en disent longs et me parle quand vous ne
faites pas attention. Alors quand le jour pointe ses rayons il est déjà temps
de partir, et je réalise que les gens que je rencontre sont des gens qui
rêvent, enfouis dans leurs mondes ils sont loin, un peu comme un sommeil dont
on ne sort jamais. Alors le rêve se supplante à la vraie vie, il nous valorise,
nous rend fort. Parfois une petite voix nous redescend, alors on réalise qu’on
est seul, que la lumière du jour vous aveugle et que vous êtes livré à
vous-même.
Je suis ombre portée qui ne
se porte plus
Ma
solitude ferme ses mâchoires sur moi, comme le broyeur de la benne à ordure. Vous auriez mal vous à ma place ?
21h15
J’entends
encore certaines amies me pourfendre de leur virulent réconfort mal jaugé… Tu
es beau, tu es riche, tu es intelligent, tu es un photographe excellent, tu
écris bien, tu as une santé de fer… Arrête de te plaindre !!!
Mais je
ne me plains pas, enfin je ne pense pas que ce que j’écris est une longue
plainte, juste l’énumération de faits. Je ne peux pas m’inventer une foule de
personnes si elles ne sont pas la. Je voulais juste apporter cette précision
pour faire cesser ce genre de conseils qui n’en sont pas vraiment. Je ne
cherche pas des conseils, je cherche des actes !
24h37 :
Sur irc à propos du journal, Cain est un homme avisé et plein de ressources, de
gentillesse et de talent verbal. Même si comme moi il se sent démesurément nul.
[00 :29]
<Nigh04> enfin y a toujours une image que j’aime… la je suis de la
lumière lunaire qui vous visite quand tout le monde dort
[00 :29]
<Nigh04> c une métaphore bien entendu
[00 :30]
<Nigh04> c un peu la métaphore d’être pas tout à fait un rayon de soleil
tout en restant brillant puis on fait rêver les autres mais on les atteint pas
vraiment
[00 :30]
<Cain> j ose pas dire ke c est le soleil ki fait briller la lune…..
[00 :31]
<Nigh04> c ce que je dis, je cherche mon soleil
[00 :31]
<Nigh04> mais comme dit la chanson, c souvent des rendez vous ratés
jeudi 8 juin 2000
La nuit ramène à la raison les cerveaux brumeux… Et sous
tonnelles et pins noirs, mon esprit vagabonde de ci de la, allant loin, aussi
loin que mon imaginaire et ma sensibilité me le permettront. J’ai l’impression
que le besoin d’aimer revient à la charge, pourtant ne trouvant personne de
vivant à des lieues à la ronde, il ne me reste que par commencer à m’aimer moi,
pauvre petite chose délaissée, que mes écrits réaniment dans un soucis de
valorisation et d’exercice littéraire.
La vie se bouscule, avance, se roule en boule et s’élance
contre des quilles imaginaires… Strike !
Je suis une quille qui tombe et une machine bien huilée me
ramasse, et me remet droit. Un jour cette machine manquera d’huile et je resterai
couché. Ne pas oublier d’acheter de l’huile de noisette !!!
Je fais mes courses, avec comme but incertain de voir la
caissière qui apportera un peu de féminité dans ma vie. C’est étrange comme mon
panier est toujours rempli des mêmes choses tous les jours. Du jus d’orange
tropicana, un morceau de saumon ou de poulet bio, parfois une revue, du lait.
Jamais rien de plus… En fait je prends que ce que je fais remplir dans un ou
deux sacs plastique car je rentre chez moi à pieds.
En sortant le soleil se balançait dans le ciel avec cette
illusion de rester immobile et de jouer avec nos ombres. Hier soir je me suis
fait souffrir inutilement, ou plutôt une personne a qui je tiens a avoué de pas
suivre mon journal, alors qu’en somme il lui est un peu destiné à elle plus
qu’à moi. J’ai sans doute mal agit, j’ai montré ma déception, ma tristesse. Il
faut toujours camoufler ses sentiments parce que sinon ils éclatent et
finissent par blesser. En gardant pour soi tous ces sentiments ratés, on
s’oblige à les utiliser comme combustibles et sortir des textes exutoires comme
ceux-ci.
<Night04> fuyons ce que l'on ne peut pas avoir :)
[03:11] <[Sadness]> non, ça je trouve ça bête... [03:11] <Night04> koike à force de
fuir on fuit parfois l'un vers l'autre
Les choses se résument d’elle-même, à l’impossible nul n’est
tenu…
Je marchais dans la rue, avec un manque de but effarent, le
but c’est marcher, faire fonctionner le corps, aller nulle part car rien ne
m’intéresse plus…
A ce moment une chose noire s’échappe de moi et virevolte,
j’ai souris me sentant soulagé d’un poids invisible. J’ai vite remarqué que
c’était un papillon, d’un noir nuit sans lune, qui voletait à côté de moi,
comme ces chiens dont on ne souhaite pas la compagnie et qui vous suit jusqu’à
ce que vous l’aimiez. Il y a des gens aussi qui restent dans votre sillage
jusqu’à ce qu’ont les aiment. Moi je ne suis dans le sillage de personne, je
n’aime personne et personne ne m’aime.
C’est plus facile ainsi, voir plus heureux, on passe à coté
de bien des peines.
Ce soir
j’ai vu au cinéma « Dans la peau de John Malkovitch » et revu pour la
60 millième fois « Doom Generation » de Gregg Araki. Toujours aussi
bon.
Je suis sorti heureux, sautant d’un trottoir à un autre, m’amusant à gravir des
marches, avec un regain d’énergie effarant. Pourtant ça m’a laissé un drôle de
sentiment, ce sentiment qui vous vient après la vue d’un film, celui de se
sentir à la fois nourrit d’une nouvelle chose, d’une expérience, et d’un autre
côté je me sentais conscient des manques que j’avais. Ce manque flagrant
d’amour, et je ne parle pas de Baise, je parle du regard de l’autre, d’entendre
une fille parler, de peut-être se tenir les yeux, de se regarder l’un et
l’autre jusqu’à ce que chacun devienne flou et alors la on est bien, on dirait
une brume qui se dissout pour révéler ce que l’on a toujours voulu secrètement
au fond de soi. Quelqu’un qui vous aime pendant au moins quelques secondes.
Mais faut pas se faire d’illusion, la personne ne vous aime pas vous, mais
l’instant que vous lui procurez, cela pourrait être n’importe qui… Koike.
Je suis à la recherche d’un
instant magique, pouvez vous me donner l’adresse où ça s’acheté et le lieu où
on le vit ? Merci